Rapport 2021 du cabinet Allen & Overy sur les mesures antitrust : le durcissement du contrôle des concentrations se poursuit

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Malgré l’essor des opérations de fusions-acquisitions à travers le monde, le nombre de transactions bloquées est resté stable : 30 en 2021 et en 2020. Néanmoins, ce chiffre pourrait connaître une forte  augmentation dans les années à venir en raison du temps requis, souvent long, pour un examen minutieux du contrôle des fusions. C’est ce que révèle le rapport « Global Trends in Merger Control  Enforcement » publié par Allen & Overy sur la situation en 2021 du contrôle des concentrations, reposant sur l’analyse de 26 juridictions dans le monde.

Le rapport « Global Trends in Merger Control Enforcement » d’Allen & Overy analyse la situation en 2021 du contrôle des concentrations. Il repose sur l’analyse de 26 juridictions dans le monde : 

  • A travers le monde, le nombre d’opérations bloquées (30) reste stable par rapport à 2020 :  19 d’entre elles ont été abandonnées et 11 interdites.  
  • Les secteurs les plus concernés sont les Sciences de la Vie (19 %) ainsi que l’Industrie  (18 %). Bien que le secteur des Technologies ait représenté 23 % de l’activité mondiale  de fusions-acquisitions en 2021, seules 7 % des opérations bloquées portaient sur ce  secteur.  
  • Les autorités de concurrence ont continué à appliquer strictement les règles : le rapport  montre une augmentation du nombre (130 en 2021 contre 34 en 2020) et du niveau des  amendes infligées pour des infractions aux règles de procédures. 
  • En Europe, 3 opérations ont été abandonnées en raison de craintes pour la concurrence  soulevées par la Commission européenne, contre une seule en 2020. 

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Le durcissement du contrôle des concentrations se poursuit, notamment en Europe 

Le maintien d’un nombre élevé d’opérations contrariées et l’anticipation de leur forte augmentation dans  les années à venir s’expliquent à la fois par le nombre croissant de dossiers déposés mais aussi par la  coordination accrue des juridictions.  

En particulier, la Commission européenne a annoncé une mise à jour de sa politique de renvoi : elle encourage désormais les autorités nationales de concurrence à lui renvoyer l’examen de certaines  opérations qui ne franchissent pas les seuils nationaux de contrôle des concentrations. L’objectif est  d’éviter les « killer acquisitions » (ou « acquisitions tueuses »), c’est-à-dire les rachats de startups en  vue de brider leur innovation. Cette révision vise plus particulièrement les secteurs du numérique, des  sciences de la vie et des biotechnologies, dans lesquels l’innovation constitue un critère concurrentiel essentiel. 

Ces évolutions au sein de l’Union européenne n’ont pas entrainé, pour le moment, une augmentation  des renvois car certains Etats membres, comme l’Allemagne, sont en désaccord avec cette politique.  Ils attendent également la résolution de l’affaire GRAIL / Illumina, emblématique de cette nouvelle  impulsion de la Commission européenne et au renvoi de laquelle la France s’est associée. 

En France, la seule opération rejetée dans son principe en 2021, par le Ministre de l’économie et avant  même que le dossier soit soumis à l’Autorité de la concurrence, fut le rachat de Carrefour par le groupe canadien Couche-Tard, une décision motivée par un enjeu de souveraineté alimentaire nationale mais  aussi d’emploi, le géant de la distribution étant le premier employeur privé de France. 

Les secteurs des Sciences de la Vie et des Technologies restent au centre des attentions

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Certaines opérations d’envergure dans le secteur du numérique risquent d’être impactées dans les années à venir par de nouvelles règles de concentration spécifiques au secteur, ainsi que par la fixation de seuils de contrôle fondés sur la valeur des transactions. 

Pour l’heure, c’est dans le secteur des Sciences de la Vie que les autorités ont été particulièrement interventionnistes : alors que ce secteur n’a représenté que 10 % des fusions-acquisitions mondiales, il a concentré 13 % des interventions. Un renforcement de cet interventionnisme est à prévoir : l’année a  en effet été marquée par le lancement d’un groupe de travail international sur les fusions dans le secteur  pharmaceutique, incluant les autorités de la concurrence du Canada, des États-Unis, du Royaume-Uni  et de l’Union européenne. 

Le nombre d’amendes pour non-respect des procédures a explosé 

Des amendes pour non-respect des procédures de contrôle des concentrations ont été infligées dans  130 cas, contre 34 en 2020, atteignant le chiffre record de 106 millions d’euros d’amendes. C’est la  Chine qui a été la plus sévère avec 100 amendes prononcées, pour un total de 9,4 millions d’euros.  L’Europe a également été active dans ce domaine à travers des cas emblématiques, comme l’affaire  Altice/PT Portugal ou encore l’amende de 7,5 millions d’euros infligée à Sigma-Aldrich pour avoir fourni  des informations incorrectes ou trompeuses lors de l’examen en 2015 de son rachat par Merck. 

« Les autorités de la concurrence à travers le monde continuent de renforcer leurs pouvoirs de contrôle  grâce notamment au développement de la coopération internationale et à l’introduction de nouvelles  règles destinées à mieux encadrer les évolutions de l’environnement économique. Même si le secteur  du numérique compte encore peu d’interventions, il est probable qu’il concentre, aux côtés des sciences  de la vie, toutes les attentions dans les années à venir. Les autorités ont également confirmé en 2021  leur préférence pour les remèdes structurels, souvent considérés plus efficaces que les remèdes  comportementaux, qui sont eux en baisse depuis 2019. », conclut Florence Ninane, responsable du  département Droit de la Concurrence d’Allen & Overy à Paris. 

 

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