Due diligence, l'impact positif de l’intelligence artificielle dans les processus de transaction

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alexandre grellierAlexandre Grellier, co-fondateur de Drooms, propose une tribune sur la due diligence et l'impact de l’intelligence artificielle dans les processus de transaction.

Lorsque le mathématicien Alan Turing se demandait : "Les machines peuvent-elles penser ?", en 1950, il n'aurait certainement pas pu prévoir que cette question déclencherait des décennies de recherche et l'émergence de nouveaux marchés autour de l’intelligence artificielle (IA) et de l'interaction entre les humains et les machines. Dans certains domaines tels que l'industrie financière, et ce n’est qu’un exemple, le potentiel des applications de l'IA est reconnu, et ce, depuis plusieurs années.

Les points de vue divergent à propos de l’lA. De mon côté, je pense qu’elle remplit son rôle lorsqu’elle vient compléter l'être humain et ses connaissances. Une étude publiée par PWC en 2017 indiquait à ce sujet que "L'IA va progressivement remplacer les hommes dans certains domaines tels que les assistants personnels et les libérer de certaines tâches à faible valeur ajoutée. Toutefois, de nombreux défis seront à relever en raison des préjugés, de la protection de la vie privée, de la confiance, du manque de personnel qualifié et des préoccupations en matière de réglementation.
L'intelligence augmentée, c'est-à-dire le soutien des gens par des machines, est une réponse à court terme". Dans le secteur bancaire, par exemple, on estime que 34 % des processus décisionnels futurs pourraient être déterminés par des algorithmes machine et 66 % par le jugement de l’homme*.

En matière de processus transactionnels, dans le domaine juridique en particulier, l'IA est dotée d’un réel potentiel. Pour rester compétitif, les cabinets d'avocats sont de plus en plus nombreux à s’intéresser et même à utiliser des solutions intégrant l’IA, notamment pour les due diligence.
Aujourd’hui, les services juridiques en entreprise recherchent des processus plus agiles, souhaitant notamment réduire les durées de leurs due diligence pour des raisons de performance et de compétitivité. Ils ne sont plus prêts à payer pour des services à faible valeur ajoutée dont certains pourraient être optimisés grâce à l’IA. Réaliser une due diligence exclusivement manuelle n’est aujourd’hui plus réaliste : la quantité de données à traiter est trop élevée. Il est presque impossible de savoir si les documents les plus pertinents ont été trouvés et consultés. Plutôt que d'examiner des centaines, voire des milliers de documents – augmentant considérablement les coûts et la durée de cette étape nécessaire de vérification, l’IA permet aux avocats de se concentrer sur l'analyse juridique, là où leur valeur ajoutée est la plus forte.

La due diligence répond à plusieurs objectifs lors des transactions de fusions & acquisitions (ou M&A) : comprendre le modèle économique de la cible, identifier et répartir les opportunités et les risques potentiels, concevoir et mettre en place les mécanismes de protection pour ces risques
(clauses d'assurance et de garantie, assurances, compensations spéciales, etc.). Ces éléments jouent un rôle déterminant dans la valeur d'un actif ou d'une entreprise.

Le recours à l’IA s’avère particulièrement utile pour les tâches impliquant le traitement répétitif de grandes quantités de données. La technologie de l'apprentissage machine peut en effet, soutenir de manière significative l'identification, la classification, l'organisation, la hiérarchisation et la mise en évidence des documents pertinents. Cependant, pour des processus efficients et surtout accélérés, il est essentiel d’entraîner cette intelligence dans la mesure où ce sont des milliers de données qu’elle aura à analyser.

Non seulement l’IA permet de rechercher ultra-rapidement un grand nombre et une grande variété de documents, mais elle peut également présélectionner les informations pertinentes parmi des milliers d'éléments basés sur des catégories individuelles et suggérer des résultats
possibles. De mon point de vue, la machine ne pourra pas remplacer l'expertise humaine, même à moyen ou à long terme. D’après moi, la relecture des documents relatifs aux risques et aux opportunités d'une transaction sera toujours effectuée par des experts juridiques.

Bien qu'ils opèrent dans un secteur plutôt conservateur, de nombreux cabinets d'avocats ont déjà commencé à s'adapter aux changements résultant de l’utilisation de l'IA afin de ne pas courir le risque d'être laissés pour compte.

Avec le lancement de NextLaw Labs par Dentons en 2015, d'importants investissements ont été réalisés notamment dans la start-up ROSS Intelligence. Cette dernière propose une application qui utilise le traitement du langage naturel et l'apprentissage automatique pour extraire des faits de milliers de documents et répondre à des questions dans un langage dit ’’classique’’.

Si le terme IA est aujourd’hui connu, son potentiel technologique est loin d'être épuisé, notamment en ce qui concerne l'automatisation des processus ou des services juridiques internes. Parce qu’elle offre la possibilité de travailler main dans la main avec les experts, l'efficacité et la rapidité des travaux à mener n’en seront que meilleurs. Grâce à l'utilisation du Machine Learning, les systèmes sont en mesure d'utiliser de manière proactive les données existantes et ainsi, de fournir des recommandations. En adaptant constamment les algorithmes, les résultats deviendront plus précis. A l’heure actuelle, notre objectif à moyen terme est de générer automatiquement 95 % des rapports de due diligence en un seul clic. Les 5 % restants seront traités par l’homme.

En résumé, l'IA joue déjà un rôle clé dans les processus de due diligence. Toutefois, elle ne devrait pas être considérée comme un substitut pour les avocats, mais bel et bien un outil de performance et de réduction des flux de travail répétitifs. La réduction des coûts et du temps associés grâce à la mise en œuvre de l'IA dans les processus de due diligence sera la principale raison pour laquelle les acteurs de l'industrie adopteront des solutions d'IA.

Alexandre Grellier, CEO de Drooms, fournisseur leader de datarooms virtuelles en Europe

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https://www.pwc.com/us/en/financial-services/research-institute/assets/pwc-top-financial-services-issues-2017.pdf


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