Emmanuel Raskin : « J'attends vraiment une prise de conscience de ce qu'est l'activité de conseil »

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Le Monde du Droit a interrogé Emmanuel Raskin, président de l’ACE, à propos du 30ème Congrès de l’ACE qui se déroulera les 6 et 7 octobre à Arcachon.

Est-ce que 30 ans, c’est un cap pour l’ACE ?

Oui, tout à fait. Depuis 30 ans, nous avons vu progresser le conseil dans sa dimension entrepreneuriale qui nous a permis de toucher tous les domaines sans se perdre au bénéfice de tous les avocats. Je souhaite que nous la préservions, et qu’à l’avenir, nous arrivions à une profession qui soit vraiment unie pour qu’elle soit crédible aux yeux des pouvoirs publics.
Il faut lutter contre les réformes qui auraient tendance à montrer une certaine défiance vis-à-vis de la profession. Je pense notamment aux attaques qui ont été portées à l'activité de conseil dans le cadre du secret professionnel, mais également au projet de réforme disciplinaire de la profession d'avocat dans le projet de loi de confiance dans l'institution judiciaire.

Les avocats sont souvent vus comme une profession de l'entre-soi alors que ça n'est pas le cas, même si parfois, on peut avoir fait une image trompeuse. Notre profession repose sur un socle important de règles de déontologie. C’est une garantie pour l’avenir de nos cabinets. Une illustration est faite par les nouveaux métiers avec la possibilité pour l’avocat d’exercer une activité commerciale accessoire à l’activité principale. Notre syndicat a réfléchi à la demande de certains confrères, qui ne sont pas une minorité, et qui souhaitent pouvoir évoluer. Cela s’est traduit par le rapport du CNB d’Audrey Chemouli. Il ne faut pas rester dans un conservatisme, sinon tout restera gelé et la profession ne s'adaptera pas aux exigences économiques de la société.

Comment l’ACE a-t-elle évolué ces 30 dernières années ?

À l’origine, l’ACE s’intéressée exclusivement au barreau d’affaires, à l’activité de conseil en entreprise. Ensuite, le syndicat a élargi ses domaines d'intervention à plusieurs autres matières de droit que celles du droit des sociétés ou du droit fiscal. Il s'est élargi notamment au domaine du précontentieux, du contentieux du droit des contrats du numérique, c'est-à-dire à toutes les matières qui ont été requises par les différentes évolutions que la société.

Si l’ACE a évolué, elle a néanmoins conservé sa vocation entrepreneuriale qui lui a permis non seulement de conseiller, de former les différentes structures d'exercice d'avocats quelles que soient leur taille et leur forme, mais également d'intervenir auprès des différentes entreprises de la société économique.
Cette dimension entrepreneuriale a été très salvatrice pour nos clients et nos cabinets membres de l’ACE pendant la pandémie. Ainsi, nous avons beaucoup dispensé de formations, abordé de nouvelles techniques comme les soft skills, le legal design, l'adaptation à la gestion des cabinets face à l'absence d'audiences. Nous avons beaucoup développé le savoir-faire dans le domaine du conseil, que ce soit sur les actes juridiques, mais aussi sur les différents domaines du droit qui étaient impactés par la crise sanitaire. Nous nous sommes rendus compte, à la sortie de la crise, que le syndicat avait vraiment évolué tout en gardant cet ADN de vocation entrepreneuriale. À nos yeux, le conseil est réellement l'activité de l'avocat. Il n'y a plus lieu à distinguer l'activité de conseil de celle de la défense parce que le conseil est consubstantiel de l'ensemble de l'activité de l'avocat. C'est la raison pour laquelle aujourd'hui, nous avons une nouvelle dénomination qui est « Avocats ensemble ».
« Avocat ensemble », c'est pour nous le conseil dans toute sa splendeur, quels que soient les domaines du droit, la dimension entrepreneuriale.
Nous sommes arrivés, non pas à une nouvelle identité, mais à une nouvelle image de l’ACE. C’est toujours la même personne, qui a bien grandi, avec une dimension beaucoup plus ouverte.

Qu’attendez-vous de ce congrès ?

Ce que nous voulons révéler lors de notre congrès est d’arriver à une prospective qui permet d'accéder à une société entrepreneuriale de droits et humaine.

J'attends vraiment une prise de conscience de ce qu'est l'activité de conseil. C'est pourquoi, nous l’avons intitulé « Cap 2030 ». C’est un hommage au conseil et à la valeur entrepreneuriale pour montrer que cette dimension concerne tous les avocats. La dimension entrepreneuriale permet d'avoir un mécanisme de stabilité, de prévisions au niveau des cabinets.

Quel est votre regard sur le barreau d’affaires ?

Les cabinets d’avocats d’affaires ont toujours partagé nos valeurs même s'ils ne sont pas tous membres de notre syndicat. Ils ont toujours été la base de notre association, mais d’autres structures de taille plus modestes sont également membres de l’ACE. Je pense que chaque structure a son mode de fonctionnement. Elle ne peut pas être évidemment répercutée en modèle sur tous les autres puisque les tailles sont différentes, les besoins ne sont pas les mêmes.

Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier 


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