La commission de l'agent immobilier peut être due par une personne différente de celle mentionnée dans le mandat de vente

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Thierry Vallat, Avocat à la Cour au barreau de ParisThierry Vallat, Avocat à la Cour au barreau de Paris, commente l'arrêt en date du 24 avril 2013 rendu par la Cour de cassation en matière de droit immobilier.

Le problème de la charge du paiement de l'agent immobilier peut se révéler délicat à gérer lorsqu'une personne différente de celle mentionnée dans le mandat se voit réclamer la commission due au titre d'une vente immobilière.

Rappelons à cet égard que l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 stipule que :
"Le titulaire de la carte ne peut demander ni recevoir, directement ou indirectement, des commissions ou des rémunérations à l'occasion de cette opération d'une personne autre que celle mentionnée comme en ayant la charge dans le mandat et dans l'engagement des parties".

Dans son arrêt rendu le 24 avril 2013 (pourvoi n° 11-28-976), la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation nous apporte une intéressante précision en nous indiquant que s'il résulte de la combinaison des articles 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 72 et 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, textes d’ordre public, que l’agent immobilier ne peut réclamer une commission ou une rémunération à l’occasion d’une opération visée à l’article 1er de la loi d’une personne autre que celle mentionnée comme en ayant la charge dans le mandat et dans l’engagement des parties, toutefois, par une convention ultérieure, les parties peuvent néanmoins s’engager à rémunérer les services de l’agent immobilier, mais cette convention ne sera valable que si elle est postérieure à la vente régulièrement conclue.

Dans cette affaire, en vertu d’un mandat non exclusif de vente donné par la société Poucel, prévoyant que la rémunération du mandataire, forfaitairement fixée à la somme de 25.000 euros, serait à la charge du vendeur, la société Tri-Logis, exerçant l’activité d’agent immobilier sous l’enseigne Espace Immo, avait négocié la vente d’un terrain à bâtir. Aux termes d'une promesse synallagmatique de vente sous conditions suspensives, des acquéreurs se sont portés indivisément acquéreurs du terrain, au prix de 180.000 euros, la commission forfaitaire étant mise "à la charge de l’acquéreur", puis, par acte unilatéral du même jour, ils se sont reconnus débiteurs envers l’agence d’une somme de 25.000 euros.

La Cour d'appel d'Aix-en-Provence décide que les acquéreurs étaient débiteurs de la rémunération de l’agence et les condamne solidairement à payer la somme forfaitaire de 25.000 euros en retenant que ces derniers avaient stipulé pour autrui en faveur de la société Tri-Logis en s’engageant à régler sa rémunération dans le "compromis" du 21 décembre 2004, stipulation à l’exécution de laquelle ni les dispositions de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1979, ni celles de l’article 73 de son décret d’application ne font obstacle.

Par ailleurs, les juges du fond avaient cru utile de préciser qu'étant des tiers par rapport au mandat de vente consenti à l’agence, les stipulants ne pouvaient se prévaloir du non-respect de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970 pour échapper à leurs obligations, et que si l’article 73 du décret d’application de la loi prescrit que l’agent immobilier ne peut recevoir de commissions ou de rémunérations d’une personne autre que celle mentionnée comme en ayant la charge dans le mandat et dans l’engagement des parties, le "compromis", qui renferme cet engagement, met précisément le paiement de la commission à la charge des "acquéreurs".
Mais la Cour de Cassation va, à juste titre, censurer cette interprétation puisque il avait été constaté que le mandat de vente mettait la commission de l’agence à la charge du vendeur.
Or, à défaut d’identité du redevable désigné dans le mandat d’entremise et dans l’acte constatant l’engagement des parties, les acquéreurs ne pouvaient valablement s’engager à rémunérer les services de l’agent immobilier que par un engagement postérieur à la réitération authentique de la vente, ce qui n'avait pas été le cas, leur engagement étant antérieur à la vente !

Professionnels de l'immobilier, attention donc à soigneusement respecter les règles préconisées par cet arrêt pour une parfaite validité de la commission sollicitée.


Thierry vallat, Avocat à la Cour au barreau de Paris


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