Daniel Schmidt et Florence Moulin, Avocats, Jones Day

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Daniel Schmidt et Florence MoulinEntretien avec Daniel Schmidt et Florence Moulin qui viennent de rejoindre Jones Day.

Pourquoi avez-vous décidé de rejoindre Jones Day ?

Florence Moulin : Les raisons sont multiples. Tout d’abord, nous avons pu constater au cours des derniers mois que la levée d’un fonds d’investissement est de plus en plus difficile. Nos clients doivent de plus en plus se tourner vers des investisseurs étrangers, qu’ils soient européens, américains ou asiatiques. Grâce à l’implantation de Jones Day sur ces différents continents, nous serons en mesure de mieux servir nos clients dans le cadre de leurs levées de fonds internationales, en nous appuyant sur des experts locaux, au fait des contraintes propres à certains investisseurs étrangers et des pratiques locales.  

Par ailleurs, en rejoignant Jones Day, nous serons en mesure d’offrir à nos clients une gamme de services plus large. Notre équipe est en effet dédiée à la structuration de fonds et nous n’accompagnons pas nos clients dans leurs « deals ». Si ce choix se justifie du fait de la complexité de la structuration de fonds, qui nécessite des compétences en matière de droit des sociétés, de regulatory et de fiscalité, il est regrettable de ne pouvoir conseiller nos clients dans leurs acquisitions. Surtout que dans certains dossiers techniques d’acquisition, il est indispensable de structurer le deal pour le rendre éligible aux ratios fiscaux des fonds. Dans ce type de dossiers, nous pourrons compter sur l’équipe deals, menée à Paris, par Renaud Bonnet et Charles Gavoty. Nous pourrons également nous appuyer sur l’équipe fiscale et leurs associés Vincent  Agulhon et  Emmanuel de La Rochethulon notamment quand des sujets liés à la fiscalité internationale sont en jeu.
Ensuite, dans un contexte de levée de fonds difficile, nos clients cherchent à se démarquer de la concurrence. Pour se faire, ils lancent des produits de plus en plus variés, que ce soit des fonds de dette, des fonds infrastructures ou encore des fonds immobiliers. Or, ici encore, Jones Day dispose à Paris d’une équipe très réputée, menée par Philippe Delelis et Nicolas Brice. 
Enfin, nous avons pu vérifier depuis le début de l’année l’émergence d’une très forte demande des corporate pour investir dans des fonds, sectoriels ou non, qui leur sont dédiés ou non. Or, une part significative de la clientèle de Jones Day est composée de corporate, issus du monde de l’industrie, demandeurs de compétences en la matière. Nous serons bien entendu ravis de servir encore davantage cette clientèle.
Daniel Schmidt : Florence a été particulièrement claire et exhaustive dans ses explications, de sorte que je n’ai pas grand-chose à ajouter ! J’insisterai pour ma part sur un point qui explique la difficulté à rester un cabinet franco- français : les investisseurs internationaux recherchent des  signatures internationales. De ce point de vue, le cabinet Jones Day, l’un des tous premiers au monde, satisfait pleinement à ce critère.

Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?

Florence Moulin : J’ai 36 ans. Après des études en droit des affaires et fiscalité, à Paris et au Royaume-Uni, j’ai commencé ma carrière d’avocats chez PDGB où je me consacrais aux deals. En 2004, j’ai rejoint l’AFIC (Association Française des Investisseurs en Capital), en tant que directrice juridique et fiscale. Mon travail consistait principalement à défendre la profession et améliorer les conditions juridiques et fiscales de son exercice. L’AFIC m’a permis d’avoir un accès direct avec les pouvoirs publics (AMF, Bercy…) et la plupart des professionnels. 
En 2008, Daniel (Schmidt) qui était le conseil juridique de l’AFIC et avec qui je travaillais depuis 2004 m’a proposé de le suivre chez Proskauer, qu’il venait de rejoindre pour créer l’activité private equity à Paris. En 2011, nous avons décidé de quitter Proskauer pour monter notre propre « boutique », que nous avons appelée DFi, car c’était un vrai défi pour nous de lancer une boutique française exclusivement dédiée à la structuration de fonds et aux produits financiers.
Daniel Schmidt : J’ai prêté serment en 1975. Pendant une dizaine d’année, j’ai exercé une activité d’avocat plaidant, essentiellement dans les domaines du droit commercial et du droit de la faillite. Puis j’ai été amené à faire de plus en plus de "fusion et acquisition", selon l’expression en vigueur à l’époque. En 1988, Sofinnova m’a demandé de faire son premier FCPR. Depuis, je me suis de plus en plus spécialisé dans la structuration de fonds, en étant tout d’abord président de la commission de déontologie de l’AFIC pendant 5 ans, puis vice-président de la commission législation et fiscalité, et conseil juridique de l’AFIC pendant plus d’une dizaine d’année. Pendant ce temps, j’ai également rédigé le livre sur les fonds d’investissement français, qui demeure le seul en la matière à ce jour. Florence m’a aidé à faire la 2ème édition, en tant que co-auteur. Une nouvelle page s’ouvre avec Jones Day.
J’ai rejoint Proskauer en 2007, puis participé en 2011 avec Florence à la création de DFi.

Qui a le plus influencé votre carrière ?

Florence Moulin : Incontestablement Daniel avec qui je travaille depuis bientôt 10 ans. Il m’a bien évidemment formée à la matière qu’il connaît et pratique depuis plus de 25 ans et avec lequel j’ai co-écrit la 2e  édition du seul ouvrage consacré aux fonds (Les Fonds de capital investissement, Gualino, 2008). Mais au-delà de ça, nous partageons de nombreuses valeurs qui se ressentent dans notre exercice quotidien, dans la relation que nous pouvons avoir avec nos clients ou nos collaborateurs. Enfin, notre travail à l’AFIC nous a profondément marqués et nous gardons toujours un très grand intérêt à suivre l’évolution de la réglementation, imaginer de nouveaux dispositifs et défendre l’industrie des fonds.
Mon travail à l’AFIC a été aussi un accélérateur car je me suis trouvée en début de carrière avec de grandes responsabilités et face à des grands professionnels. Je pense notamment aux présidents de l’AFIC que j’ai pu accompagner, que ce soit Dominique Oger, Gonzague de Blignières, Patrick Sayer ou Eddie Misrahi, auprès desquels j’ai beaucoup appris. 
Daniel Schmidt : Incontestablement, ma famille ! Mon grand-père et mon père étaient avocats. Mon frère aîné, le professeur de droit et avocat Dominique Schmidt, m’a appris le droit des sociétés, et la pratique des fusions-acquisitions. Mon frère Jean-Bernard Schmidt, en tant que président de Sofinnova, m’a donné le goût du private equity et des fonds. Cela étant, le milieu du private equity est composé de gens passionnants. Nous avons aussi côtoyé des personnalités impressionnantes à Bercy, particulièrement au sein de l’administration fiscale.

Quel est votre meilleur souvenir dans votre carrière ?

Florence Moulin : Pour ce qui est de l’AFIC, le jour où Thierry Breton, alors Ministre de l’économie et des finances, a annoncé que les investisseurs des FCPR et SCR seraient exonérés d’impôt sur les plus-values et le jour où le gouvernement a accepté d’étendre la réduction d’ISF aux investissements réalisés via des FCPR, FCPI et FIP. Ces deux réformes venaient récompenser des mois de travail.
Pour ce qui est de mon exercice professionnel, j’ai la chance de travailler souvent sur des dossiers techniques et complexes. C’est toujours très stimulant. Et puis généralement, quand un client vous remercie pour votre travail, c’est toujours une grande satisfaction.
Daniel Schmidt : J’ai la chance de partager avec Florence ses meilleurs souvenirs de l’AFIC. Aboutir à une taxation à 0% ne peut qu’être le plus beau succès pour un avocat fiscaliste !
Sinon, je dois à mon amie Claude OHL, avocate à la cour de cassation, un arrêt en chambre réunie consacrant 10 années de combat pour un client.

Quels sont vos domaines de compétences ?

Florence Moulin : Je suis spécialisée en structuration de fonds d’investissement : FCPR, FCPI, FIP, FCP contractuels, SCR, holdings d’investissement. Mon travail consiste donc principalement à définir avec le client la forme idoine, tant d’un point de vue juridique et fiscal, au vu de ses investisseurs, du client et de sa politique d’investissement. Une fois que cette forme a été définie, nous définissons ensemble les caractéristiques de l’entité retenue et élaborons toute la documentation (règlement, statuts, mémo d’investissement, contrats de vesting, side letter), que nous négocions avec les investisseurs, français et étrangers.
Mais mon travail ne s’arrête pas là puisque nous nous intéressons à tous les sujets qui touchent nos clients : agrément AMF ou ACP, conditions de commercialisation de leurs services ou de leurs titres, opérations secondaires, contraintes des investisseurs institutionnels (assureurs, banques, mutuelles), contentieux fiscaux, lobbying, etc.
Daniel Schmidt : J’essaye d’avoir les mêmes compétences que Florence.

Quelles sont, selon vous, les actualités marquantes de ces dernières semaines dans ces secteurs d'activité ?

Florence Moulin : On voit bien que les autorités françaises et européennes s’intéressent de plus en plus à ce secteur. Les chantiers à venir sont nombreux : directive AIFM, aides européennes pour le capital investissement, avenir des FIP et FCPI, fiscalité des investisseurs… Tous sont à suivre de près car ils devraient avoir un effet significatif sur les fonds. A tout point de vue, je pense que nous sommes à une période charnière : la levée de fonds de demain ne sera pas la même que celle d’aujourd’hui.
Daniel Schmidt : J’ajouterai qu’un sujet me semble particulièrement important actuellement : la mise en place d’un nouveau type de fonds, avec une meilleure gouvernance, permettant des réductions fiscales en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune, mais aussi, et surtout, d’impôt sur les sociétés. Je suis convaincu que les investisseurs "corporate" ont vocation à remplacer les investisseurs traditionnels, empêtrés dans les réglementations de Bâle III et Solvency II.

Qui conseillez-vous ?

Florence Moulin : Nos clients sont principalement des sociétés de gestion agréées par l’AMF, filiales d’institutionnels ou entrepreneuriales, des prestataires de services d’investissement ou des sociétés non régulées (sociétés d’investissement lancées par des entrepreneurs, experts de la finance, corporate mais aussi sociétés de conseil).
Nous accompagnons aussi des investisseurs notamment étrangers (fonds de pensions, etc.) qui souhaitent investir dans des fonds français.
Daniel Schmidt : Nous intervenons également pour des acheteurs "en secondaire", soit de portefeuille, soit même de société de gestion. De même, nous conseillons des acteurs de la profession dans leurs difficultés soit avec leurs investisseurs, soit avec leurs associés.

Quels sont vos objectifs pour  le cabinet ?


Daniel Schmidt : Améliorer encore la qualité de nos services, pour faire de Jones Day Paris le 1er intervenant en private equity sur la France !
Florence Moulin : Daniel a parfaitement résumé notre ambition. Avec Jones Day et ses équipes, nous avons les moyens de devenir le 1er acteur en private equity (fonds et deals). Au-delà de cet objectif, nous comptons poursuivre le développement de notre activité, en continuant à accompagner nos clients tout en leur offrant une gamme de services plus étendue, en servant les clients de Jones Day, issus du private equity ou de l’industrie, et en accélérant notre activité en matière de fonds alternatifs (infrastructures, dettes, etc.). 

Propos recueillis par Arnaud DUMOURIER

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