Marie-Aimée Peyron : « Les avocats prennent en main leur avenir numérique »

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Alors que l’inauguration des locaux de l’incubateur du barreau de Paris a lieu aujourd’hui, lundi 2 juillet 2018, Marie-Aimée Peyron, bâtonnier du barreau de Paris, revient sur le rôle de l’incubateur, son développement et sa vision du numérique pour encourager les initiatives innovantes au sein de la profession qui se traduit par l’incubation physique de quatre legaltech.

Quel est le rôle de l’incubateur ? 

L’incubateur existe depuis quatre ans. Il a contribué par son prix de l’innovation à récompenser les initiatives innovantes. Nous allons donner une nouvelle impulsion en incubant physiquement des jeunes pousses pour les aider à se développer de façon à créer leur projet comme le font traditionnellement les incubateurs. 
Pour ce faire, il faut identifier les bons projets. Cette année, nous avons reçu 35 projets. Nous en avons sélectionné 11.
Le jury, qui comprend notamment deux membres de l’incubateur (Harry Allouche et Arnaud Touati) et des experts du domaine, s’est réuni jeudi 28 juin pour déterminer les quatre jeunes pousses qui seront incubées physiquement. Elles seront dévoilées aujourd'hui à l'EFB.

Quel regard portez-vous sur le développement de l’incubateur du barreau de Paris ?

Je suis un bâtonnier heureux parce que nous sommes en train de mettre en place ce que nous souhaitions avec Basile Ader. C’est la réalisation d’un projet qui a été adopté à la quasi-unanimité par le conseil de l’Ordre de Paris sur un rapport de Nathalie Attias et Jean-Georges Betto, membres du Conseil de l’Ordre. Par ailleurs, nous sommes aussi portés puisque notre ministre de la Justice, Nicole Belloubet, sera présente aujourd’hui pour remettre le prix de l’innovation de l’année dernière, inaugurer les locaux à l’Ecole de Formation du Barreau (EFB), et ouvrir le campus numérique, innovation et interprofessionnalité qui se déroulera pendant deux jours à l’EFB. Elle est très attachée au développement du numérique. Sa présence témoigne de sa volonté d’encourager nos actions de formation au numérique des élèves-avocats avec le LAB EFB, mais aussi à former les avocats dans le cadre de la formation continue. Le ministre du numérique, Mounir Mahjoubi, souhaitait être présent mais malheureusement il n’est pas disponible.
Enfin, le succès de l’incubateur du barreau de Paris a donné naissance au réseau national des incubateurs de barreaux et tout récemment au réseau international des incubateurs d’avocats.

Comment va se réaliser concrètement l’accompagnement des sociétés incubées ?

L'incubateur du barreau de Paris se dote aujourd'hui d'un véritable programme d'incubation physique avec une capacité d'accueil de quatre legaltech. C’est une incubation spécifique à la legaltech par des experts de l'innovation. Ces start-up bénéficieront d'un an de prestations et évolueront aux côtés d'experts de l'innovation juridique et judiciaire : 750 heures de contenues sous la forme de conférences, du mentorat spécifique aux besoins de la start-up, des ateliers sur différents sujets utiles dans le développement de leur future activité. 

Quelle place ont les avocats dans le marché du droit en ligne ?

Les avocats n’ont pas attendu pour s’emparer du numérique. Les avocats prennent en main leur avenir numérique. Beaucoup d’avocats ont déjà investi le marché du droit en ligne. Par exemple, le cabinet Alto Avocats, Marc Lipkier sur la blockchain. Nous voulons un Ordre qui aide les avocats à se doter des outils numériques. Nous voulons encourager le développement des legaltech mais en conservant la majorité du capital pour donner le maximum de garanties à nos citoyens (compétences, assurance, déontologie extrêmement stricte) et assurer la sécurité juridique.
De nombreux confrères ont montré qu’ils ont des solutions compétitives dans le monde de la legaltech.

D’aucuns stigmatisent la déontologie comme frein à l’innovation. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que notre déontologie est une force. Nous avons modifié notre déontologie notamment pour permettre aux avocats de faire de la publicité. Le conseil de l’Ordre de Paris a également approuvé la création de boutiques d’avocats en leur demandant des modifications pour être en conformité avec notre déontologie. Notre règlement intérieur permet beaucoup de choses ce que les avocats ne savent pas forcément !

Les avocats créateurs de legaltech souhaitent davantage de moyens financiers. Comptez-vous investir dans ces sociétés ?

Il n’est pas question de prendre de participation dans ces start-up. Ce n’est pas le rôle de l’Ordre des avocats du barreau de Paris d’investir au sein de sociétés composées d’avocats. En revanche, comme je l’ai souligné, notre rôle consiste davantage à contribuer à leur développement en ce qui concerne le savoir-faire, la technologie en travaillant avec des experts.

Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)


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