L’accord de performance collective : une opportunité de meilleur partage de la valeur

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A quelques semaines de l’élection présidentielle, les propositions sur le pouvoir d’achat et le partage de la valeur ne manquent pas. Pourtant, le code du travail recèle déjà en la matière une réserve abondante, dont l’accord de performance collective, qui doit être utilisé à sa juste mesure.

Par le renvoi à l’accord collectif d’entreprise comme outil privilégié de régulation sociale, les conditions sont aujourd’hui réunies pour que les entreprises définissent une politique sociale innovante, pour répondre à leurs enjeux.

Cette part belle faite au droit négocié ne doit en effet pas conduire à une négociation collective mobilisée seulement ponctuellement ou uniquement pour respecter une obligation légale.

Les enjeux de transformation numérique et de transition écologique, porteurs de ruptures qui redessinent le travail, sont l’opportunité de définir une politique sociale dépassant une gestion purement transactionnelle et de court terme des relations économiques et sociales.

A ce titre, l'accord de Gestion Prévisionnelle de l'Emploi et des Parcours Professionnels, s'appuyant sur la stratégie de l'entreprise, gagnerait à retrouver ses lettres de noblesse.

Mais c’est aussi et surtout l’accord de performance collective (APC), permettant d’adapter les contrats individuels de travail aux enjeux organisationnels, qui mérite une attention plus forte.

En cohérence avec la loi dite PACTE, dont l’objet premier a été de réconcilier l’entreprise avec ses parties prenantes, l’APC est un outil destiné à faire prévaloir l’intérêt collectif sur l’intérêt individuel, au service de la réussite de l’entreprise dans son ensemble, c’est-à-dire dépassant l’antagonisme dépassé entre capital et travail.

L’APC est aussi l’outil le plus disruptif par rapport au dogme d’intangibilité du contrat de travail sur lequel s’est construit le droit social. L’APC bouscule ce postulat. Tout est permis ou presque.

L’enjeu est donc de s’en servir. Plus ! Car le dispositif peine encore à prendre ses marques, avec moins de 1 000 accords signés à ce jour. Mais aussi mieux !

L’APC est le levier idoine pour affronter les effets d’une crise, en sollicitant un effort des salariés (en termes d’organisation ou de durée du travail, de rémunération...). Mais son objet n’est pas limité à la préservation de l’emploi et ce serait une erreur de perspective que de l’enfermer dans un schéma qui aboutirait à une régression sociale. Il est essentiel que les entreprises le voient aussi comme un accélérateur de progression sociale et de stimulation de la performance de l’entreprise.

Avec des conditions de recours larges et susceptibles d’embrasser une grande variété de situations (création d’emplois, nécessités de fonctionnement de l’entreprise), nous pensons qu’il est désormais grand temps de passer d’un usage strictement « défensif » de cet outil à une utilisation résolument « offensive » et « solidaire ».

L’APC présente en effet toute la souplesse nécessaire pour répondre aux ruptures liées aux évolutions technologiques et environnementales qui imposent de repenser les modes d’organisation collective et d’accélérer l’innovation.

Nous sommes ainsi convaincus que l’agilité organisationnelle permise par cet accord est déterminante face aux enjeux clés de mobilité professionnelle vers des compétences non-automatisables (polyvalence et flexibilité) et vers un management par incitation (autonomie, pouvoir d’action et de décision des collaborateurs), de nouveaux rapports au temps de travail, et enfin d’association directe aux résultats.

Les évolutions permises par l’APC pour répondre à ces défis de notre temps doivent nécessairement s’accompagner de mesures de protection sociale, de formation, mais aussi, et surtout, de partage de la valeur créée.

En définitive, alors que la croissance de l’économie française l’an dernier (+7%) a été bien supérieure à celle attendue, ne ratons pas, dans cette nouvelle phase de rebond, l’opportunité d’inscrire la négociation des futurs accords de performance collective dans la recherche d’une solution économique et sociale globale. Une solution qui concilie au mieux l’impératif de croissance et de compétitivité avec le devoir non moins impérieux d’améliorer durablement le partage de la valeur au sein de l’entreprise.

François Perret, Ambassadeur à l’intéressement et la participation auprès du gouvernement et Alexandre Lamy, avocat - associé du cabinet Arsis Avocats, membre de l’Institut Sapiens et co-fondateur du Cercle Néos


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