Le barreau de Paris se mobilise pour Ayse Acinikli et Ramazan Demir, avocats turcs emprisonnés

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Ramazan Demir et Ayse AcinikliLe barreau de Paris multiplie les initiatives pour obtenir la libération des avocats turcs Ayse Acinikli et Ramazan Demir, avocats détenus pour avoir assuré la défense d’opposants au régime.

Depuis le 6 avril 2016, Ayse Acinikli et Ramazan Demir sont emprisonnés pour avoir défendu opposants et journalistes. Le barreau de Paris, qui a toujours été aux côtés du barreau stambouliote quand il était menacé, a apporté son soutien aux avocats turcs en écrivant aux autorités turques et françaises leur demandant leur libération. Dans une tribune publiée sur Le Monde.fr et sur le site de la FIDH, le barreau de Paris explicite sa démarche : "Si les avocats se taisent, les libertés seront définitivement étouffées. L’avocat est au coeur de l’état de droit, barrière ultime de l’arbitraire. Défendre Ramazan Demir et Ayse Acinikli c’est défendre la liberté".

Ramazan Demir Ayse Acinikli cartespostalesA l’origine de ces initiatives, se trouve un groupe de quatre avocats parisiens déterminés (Rusen Aytac, Jennifer Halter, Martin Pradel et Jacques Bouysou) qui ont commencé par saisir dès le 19 avril la raporteure des Nations-Unies pour l’indépendance de la justice avant de s’efforcer de diversifier les actions pour mobiliser le barreau dans son ensemble et si possible l’opinion publique. Ils ont ainsi créé un groupe de soutien sur Facebook et lancé une campagne auprès des avocats français afin qu’ils envoient massivement des cartes postales à Ayse Acinikli et Ramazan Demir sur leurs lieux de détention (également postées sur les réseaux sociaux sous le hashtag #5StampsForMyImprisonedLawyer) ; c’est un moyen pour les avocats français d’exprimer leur soutien et d’attirer l’attention des pouvoirs publics turcs sur l’ampleur de la mobilisation des barreaux français mais aussi étrangers puisque de nombreux avocats dans le monde ont relayé cette initiative. Ainsi, de nombreux représentants de la profession dont les bâtonniers des barreaux de Paris, Madrid et Genève, le président de la fédération argentine des barreaux, le président du barreau mexicain, le président de la Conférence des Bâtonniers français, le Président du Conseil des barreaux européens, la vice-présidente de la fédération des barreaux Européens et le bâtonnier du barreau de Bruxelles ont adressé des cartes postales rédigées en turc à Ramazan Demir et Ayse Acinikli. Plusieurs milliers de cartes postales sont ainsi parvenues à Ayse Acinikli et Ramazan Demir. La mobilisation a également pris la forme de pancartes tenues par les avocats à différentes occasions comme pendant Campus Avocats.

Ramazan Demir Ayse Acinikli pancartesPour Jacques Bouyssou, membre du Conseil de l’Ordre des avocats de Paris, "on ne peut pas laisser violer les libertés publiques sans réagir. Les juges turcs qui, après avoir emprisonné des avocats, se trouvent à leur tour sous les verrous, montrent combien la présence d’un avocat libre est nécessaire et combien l’avocat est l’ultime rempart de l’état de droit et de la démocratie."

Le 22 juin dernier, c’était le procès de Ramazan Demir et Ayse Acinikli accusés d'être membres d'une organisation terroriste et, pour Ramazan Demir de faire de la propagande contre l’Etat. En réalité, on lui reproche les actions qu’il a portées contre l’état turc devant la CEDH. La vice-bâtonnière de Paris, Dominique Attias, s'était également rendue sur place, tout comme de nombreux avocats italiens, allemands, français ou hollandais. Le procès qui s’est tenu dans une ambiance électrique, "une véritable mascarade !" selon Jacques Bouyssou, pendant lequel le président a fait verrouiller la salle d’audience, a abouti au maintien de la détention des avocats turcs.

Ramazan Demir Ayse Acinikli concours plaidoiriesEnfin, le barreau de Paris qui a fait de Ayse Acinikli et Ramazan Demir des membres d’honneur de son barreau, a organisé, jeudi 21 juillet 2016, à la maison du barreau de Paris un concours international de plaidoiries pour permettre à des confrères venus du monde entier d‘offrir une plaidoirie aux avocats turcs alors qu’ils étaient détenus depuis plus de cent jours. Une quinzaine d’avocats représentants toutes les générations du barreau de Paris (3 élèves avocats et 3 candidats au Bâtonnat) ou les barreaux du monde (New Delhi, Naples, Conakry ou Madrid) sont venus offrir leurs plaidoiries à leurs confrères emprisonnés.

Les deux avocats comparaîtront à nouveau le 7 septembre prochain. Depuis, le contexte s'est durci avec une purge lancée après le putsch du 15 juillet conduisant à l’arrestation de policiers, magistrats, universitaires et de journalistes.

Arnaud Dumourier (@adumourier)


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