Les conclusions d'avocat ne peuvent donner lieu à action en diffamation

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Viole l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, la cour d'appel qui, pour condamner une partie au paiement de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral occasionné par le contenu de ses conclusions, se fonde sur l'article 1382 du code civil alors que seul l'article 41 précité est applicable.

Une usufruitière d'un corps de ferme avec terres attenantes a assigné sa belle-sœur, la nue-propriétaire, pour la voir condamner à l'indemniser du coût des travaux de démolition et de sécurisation de certains bâtiments devenus indispensables selon elle à raison de leur vétusté et de travaux de démolition entamés par la nue-propriétaire puis délaissés, et à lui verser des sommes en réparation du préjudice moral subi.

La cour d'appel de Douai a condamné la nue-propriétaire à verser à l'usufruitière des sommes au titre du préjudice moral occasionné par ses conclusions en défense signifiées le 2 septembre 2008. Les juges du fond ont retenu que la référence dans ces écrits au suicide de l'époux de l'usufruitière était étrangère au débat concernant les travaux à réaliser dans l'immeuble et présentait un caractère infamant pour celle-ci. Ils en ont déduit que l'usufruitière était fondée à demander réparation de son préjudice moral en application des dispositions de l'article 1382 du code civil.

Le 3 mai 2012, la Cour de cassation censure partiellement l'arrêt au visa de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 aux termes duquel "ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux ; pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts ; pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers".
Ainsi, la cour d'appel a violé l'article 41 susvisé qui était seul applicable en l'espèce.