Prescription de l'action en requalification d'un contrat en bail commercial

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Le délai de prescription biennale applicable à l'action en requalification d'un contrat en bail commercial court à compter de la conclusion du contrat dont la requalification est recherchée, y compris même en présence d'une succession de contrats distincts dérogatoires aux dispositions du statut des baux commerciaux.

Pour loger son personnel, une société exploitant un commerce de piano-bar-restaurant dans une station de ski a conclu avec la commune, entre le 15 novembre 2009 et le 31 octobre 2015, sept conventions successives qualifiées de "convention d'occupation précaire".
A l'approche de l'expiration de la dernière convention, la bailleresse a adressé à la locataire un projet de "bail de location saisonnière" pour l'année 2016, stipulant une durée de sept mois à l'issue de laquelle le preneur devra quitter les lieux.
Restée sans interruption en possession des lieux depuis la date d'effet de la première convention, la locataire a, en mai 2016, assigné la bailleresse, revendiquant l'existence d'un bail commercial et l'application du statut des baux commerciaux.
A titre reconventionnel, la bailleresse a sollicité son expulsion et le paiement d'une indemnité d'occupation.

Pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande de requalification de la convention en bail commercial, la cour d'appel de Chambéry a énoncé, d'abord, que le point de départ du délai de prescription était la date de conclusion de la convention initiale, y compris en cas de reconduction tacite ou de renouvellement par avenants successifs et qu'une telle solution s'imposait également en cas de renouvellement par conclusion d'un nouveau contrat similaire.
Relevant, ensuite, que depuis la signature de la première convention en 2009, la relation contractuelle avait été renouvelée dans les mêmes conditions, entre les mêmes parties et pour les mêmes locaux, la locataire n'ayant jamais quitté les lieux ni rendu les clefs à l'expiration de chaque période renouvelée pour la même période, les juges du fond en ont déduit que le délai de prescription de l'action avait commencé à courir à compter de la date de conclusion du premier contrat entre les parties.

Dans un arrêt du 25 mai 2023 (pourvoi n° 22-15.946), la Cour de cassation invalide ce raisonnement : la locataire demandait la requalification du dernier contrat conclu entre les parties, en sorte que le point de départ de la prescription de son action courait à compter de la date d'effet de cette convention, en l'espèce le 1er novembre 2014.
Elle précise en effet que le délai de prescription biennale applicable à l'action en requalification d'un contrat en bail commercial court, même en présence d'une succession de contrats distincts dérogatoires aux dispositions du statut des baux commerciaux, à compter de la conclusion du contrat dont la requalification est recherchée.
L'arrêt d'appel est donc cassé au visa de l'article L.145-60 du code de commerce.

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