Les réseaux sociaux apparaissent sans aucun doute comme une opportunité à saisir pour les entreprises, notamment en termes de marketing. Toutefois, ces mêmes procédés techniques sont également le vecteur d’atteintes à la réputation de l’entreprise par la propagation rapide de propos susceptibles d’être dévastateurs pour son image. Le droit pénal donne des armes pour protéger son e-réputation.
Des infractions adaptées aux nouvelles technologies
Les principales atteintes à la réputation de l’entreprise ont lieu à l’occasion de la publication de propos diffamants sur des blogs, des forums ou des pages de profils, lesquels sont ensuite repris de manière virale. L’atteinte à la réputation peut également se réaliser par la création de faux profils visant à usurper l’identité de l’entreprise ou de ses dirigeants afin notamment de donner du crédit à de fausses informations.
Dans ces deux cas, la loi, prenant en compte la particularité des technologies numériques, offre des textes de répression adaptés.
La loi dite LOPPSI 2 a introduit dans le code pénal un article 226-4 visant à réprimer l’usurpation d’identité sur un réseau de communication au public en ligne lorsque celle-ci « a pour but de troubler la tranquillité d’autrui ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération ». Auparavant de tels faits relevaient du droit civil. Désormais, l’usurpation d’un profil Facebook ou d’un compte Twitter est passible d’une peine maximale d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende. Le recours au droit pénal, outre son caractère plus dissuasif, permettra de confier la recherche de l’auteur de l’usurpation aux autorités judiciaires.
Parallèlement, les principales atteintes à l’e-réputation se font par la divulgation de propos diffamatoires. La diffamation s’entend comme « l’allégation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la réputation », au-delà de l’opinion ou du droit de critique.
La multiplicité d’intervenants sur Internet, comme la domiciliation de nombreuses sociétés à l’étranger, peut s’avérer un obstacle au déclenchement de poursuites. C’est pourquoi, les textes régissant la diffamation ont été adaptés aux évolutions technologiques et définissent les responsabilités des différents acteurs de l’Internet.
Les responsabilités définies par la loi
En principe, le prestataire technique du réseau social, qui n’en réalise que l’hébergement, n’est pas responsable de son contenu éditorial. La responsabilité des propos litigieux incombera donc à l’éditeur du contenu qui est considéré comme directeur de la publication, dès lors qu’il y fixation préalable des propos. La loi a prévu l’obligation d’identifier cet éditeur et son directeur de publication, directement sur le site lorsqu’il s’agit d’un professionnel, ou par recours auprès de l’hébergeur qui dispose de ses coordonnées lorsqu’il s’agit d’un particulier. La loi prévoit également qu’à défaut de responsabilité de l’éditeur, la responsabilité de l’auteur des propos sera engagée.
Le législateur pour tenir compte de l’évolution de l’utilisation d’Internet a crée lors de l’adoption de la loi dite HADOPI une exception à la responsabilité de l’éditeur pour ce qui concerne les contributions sur les espaces de communications personnelles tels que les blogs ou forum. Dans cette hypothèse, l’éditeur ne sera pas responsable du contenu diffamatoire publié par les internautes sur son site, sauf à démontrer que celui-ci en a eu connaissance et qu’il n’a pas agit promptement pour le retirer.
Dans cette hypothèse, seule la responsabilité de l’auteur des propos pourra être recherchée.
Toutefois, la Cour de cassation semble résister à cet amendement par deux arrêts du 16 février 2010, en transposant, au profit de la victime des propos, la notion télévisuelle de « producteur » à l’éditeur d’un forum thématique qui choisit le sujet de discussion sur lequel les internautes vont échanger. Cet éditeur, en tant que « producteur », deviendrait ainsi responsable des propos échangés par les internautes, en l’absence même de modération a priori. Cette jurisprudence incite donc à la modération a priori des espaces de contributions personnelles et permet aux victimes d’identifier la responsabilité de propos souvent échangés de manière anonyme.
Les moyens d’actions
Une fois les propos diffamants identifiés, la victime dispose de plusieurs moyens d’action offerts par la loi. Celle-ci peut réaliser une notification auprès de l’hébergeur pour obtenir le retrait des propos ou exercer un droit de réponse prévu par la LCEN.
Ensuite, si les propos le justifient, notamment par leur gravité ou leur publicité, la victime pourra choisir d’engager des poursuites.
Il conviendra, au préalable, de procéder à l’identification de l’éditeur ou de l’auteur du contenu, au besoin par requête ou en référé auprès de l’hébergeur et du FAI, pour pouvoir l’attraire directement devant le tribunal par le biais d’une citation directe. En cas d’impossibilité, il reste également possible, en matière de presse, de déposer une plainte avec constitution de partie civile.
Il faut garder à l’esprit que l’action doit être rapide, non seulement pour endiguer les rumeurs et limiter l’atteinte à la réputation, mais aussi parce que la loi impose d’agir dans les trois mois de la publication originelle des propos diffamants.