HSBC condamnée pour pratiques commerciales trompeuses

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etienne petit_mathieuEtienne PETIT, avocat, revient sur la condamnation d'HSBC pour pratique commerciale déloyale.

Diffusée du 21 janvier 2009 au 13 février 2009 dans 15 journaux - du quotidien au mensuel – la publicité pour le « Compte épargne direct » d’HSBC proposait des comptes courants rémunérés à 6 % pendant les six premiers mois, puis à 3, 75 % après cette période de bienvenue, pour l’ouverture d’un compte effectuée sur le site de la banque entre le 20 janvier 2009 et le 31 mars 2009 en utilisant le code promo « 019CED ».

Jusque-là, rien à redire : une offre promotionnelle clairement présentée. Mais une offre particulièrement attractive qui a rencontré un succès imprévu. Et c’est pourquoi HSBC a décidé le 13 février d’interrompre son offre à partir du 19 février, sans pour autant suspendre la procédure d’ouverture des comptes sur son site en utilisant le code promotionnel.

La conséquence : des consommateurs ont engagés des frais pour fermer leurs comptes dans d’autres banques et transférer les fonds vers leur nouveau compte ouvert chez HSBC en pensant bénéficier de l’offre à 6 % et ils ne dû attendre de consulter leur premier relevé de compte pour comprendre qu’ils n’en bénéficiaient pas.

Une pratique commerciale loyale lors de son émission mais qui est devenue trompeuse à partir du moment où HSBC à continuer d’accepter et de traiter des souscriptions alors qu'elle n'appliquait plus le taux initialement annoncé sans que le souscripteur en soit avisé.

Ce faisant, HSBC a, selon les magistrats de la Cour d’appel de Paris, manifestement altéré le comportement économique d'un consommateur normalement attentif et avisé, trompé sur les qualités essentielles du contrat souscrit et la portée de l'engagement de l'annonceur.

Une décision approuvée par la Cour de cassation le 13 janvier dernier (pourvoi n° 14-88136) qui est particulièrement intéressante en ce qu’elle illustre une situation qui se rencontrer : l’opération promotionnelle produit des résultats très supérieurs à ceux qui étaient prévus, risquant de mettre en péril les intérêts de l’annonceur.

Dans ce cas, comment réagir ? Certainement pas comme l’a fait HSBC qui a mis en avant « un engorgement de ses services », justification écartée par les juges qui soulignent ne pas comprendre en quoi le temps de traitement administratif de l’ouverture d’un compte est différent selon qu’il s’agit d’un compte rémunéré à 6 % ou à 3, 75 % ou qui expliquait qu’en matière bancaire, il est toujours possible de refuser de contracter.

Ce que reprochent les juges à HSBC, c’est la disproportion « évidente » entre les moyens mis en œuvre par la banque pour lancer sa campagne et ceux déployés pour l'arrêter prématurément. Dépassée par le succès commercial de son offre, HSBC a préféré ne préserver que ses propres intérêts : elle n’a pas engagé tous les moyens dont elle pouvait disposer pour s'efforcer de répondre aux effets pour le consommateur.

Qu’aurait-elle dû faire ? Selon les magistrats Parisiens, financer une campagne rectificative dans les quinze revues et magazines auxquels elle avait eu recours pour la promouvoir et mettre en œuvre sur son site un dispositif efficace d'information, d'alerte et de blocage relatif à la procédure de souscription à son offre désormais périmée.

La première de ces mesures peut sembler excessive car, comme l’expliquait HSBC, l'organisation d'une campagne publicitaire rectificative dans la presse, matériellement impossible à réaliser sur le champ, aurait été inutile, compte tenu des délais de diffusion, de la périodicité des périodiques concernés et du caractère aléatoire de leur consultation supposée par les personnes intéressées. La seconde, en revanche, est évidente : rapide à mettre en place, peu onéreuse, elle aurait dû s’imposer.

Mais les juges n’interdisent pas à un annonceur dépassé par le succès d’une promotion d’y mettre prématurément fin, ce qui est aussi un enseignement important en soi. La contrepartie, pour éviter que résulte de cet arrêt une pratique commerciale trompeuse, résidera alors dans les moyens déployés pour s’assurer qu’un consommateur attiré par l’offre ne puisse plus croire pouvoir en bénéficier : message d’alerte, rejet du code promotionnel, etc. Et en cas de litige, c’est l’ensemble des mesures prises par le professionnel pour mettre les informations complémentaires à la disposition du consommateur par d'autres moyens qui devrait être pris en compte (Cass. crim., 1er sept. 2015, n° 14-85791).

Etienne Petit, Avocat