Les enjeux juridiques de la COP 21 : Patricia Savin et Yvon Martinet, Associés, DS Avocats

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Le Directeur de la Rédaction du Monde du Droit, Arnaud Dumourier, a interrogé deux associés du cabinet DS Avocats, Patricia Savin et Yvon Martinet sur les enjeux juridiques de la COP 21.

Le changement climatique est une cause commune

Pour Patricia Savin, d'un point de vue international, la grande question posée est celle de savoir si l'accord juridique va être contraignant et quelle forme prendra celui-ci. Selon elle, il faut d'ores et déjà considérer le succès de cette Conférence des Nations Unies puisque la société civile s'est complètement approprier cette question du changement climatique comme une cause commune.

Le premier enjeu est donc de savoir si l'engagement des états dans des mesures contraignantes, ou non, sera à la hauteur des attentes de la société civile.

La question du statut des déplacés environnementaux

Le deuxième enjeu concerne les déplacés environnementaux et notamment le statut qui leur sera accordé: " On parle beaucoup de climat, de réchauffement climatique avec les solutions que les entreprises sont en train d'apporter e termes d'adaptations et d'atténuations. Or, au-delà de cela, le GIEC a bien annoncé que d'ici 2050 on pouvait s'attendre à ce qu'il y ait 200 millions, voire un milliard, de déplacés environnementaux. Le vide juridique dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui, nous pousse donc à nous questionner sur le statut juridique attribué à ces déplacés."

Opposer climat et sécurité serait une erreur. Selon l'avocate associée, il y a une nécessité de "prendre à bras le corps tout ce qui impacte et impactera la société dans l'ensemble de ces composantes." Celle-ci ajoute l'exemple de la Syrie en soulignant que la sécheresse qu'a connu le pays trois ans durant a impacté 17% de la population et que cela s'est suivi d'une période d'instabilité politique. Cela signifie donc que traiter la question du réchauffement climatique à l'échelle planétaire, c'est traiter la question de la sécurité.

Repenser le modèle économique

Enfin, le troisième et dernier enjeu est celui d'un changement de paradigme: "Nous sommes dans une transition énergétique, et qui dit transition énergétique, dit s'intéresser aux liens de la biodiversité mais aussi à la question des outils juridiques à mettre en place pour promouvoir une économie circulaire plutôt que linéaire, comme nous la connaissons depuis des siècles. Sortir du "je produis, je consomme, je jette."" Le point que met en exergue Patricia Savin est finalement celui d'une nécessité de repenser le modèle économique en promouvant que le droit est l'un des outils qui permet de sécuriser cette nouvelle façon de vivre l'économie d'aujourd'hui et l'économie de demain dans une transition énergétique , dans une refonte du modèle économique.

Des enjeux juridiques multiples

Yvon Martinet voit, lui, deux grands principes juridiques qui fondent l'accord international. Le principe de responsabilité commune mais différenciée et le principe dit MRV Mesuring Reporting Verification sont ces deux principes juridiques. Ces deux processus enclenchés ensemble, amèneront "un système de vérification des engagements,  de reporting sur ces engagements et finalement, espérons le, dans cinq ans, si l'accord est signé à Paris, en 2020 un accord qui sera, on va dire, l'accord remplaçant celui de Kyoto." C'est tout l'enjeu de la mise en œuvre de ce système MRV qui fait la question juridique principale. Cette mise en œuvre passera par la question de la régulation et en particulier la fixation ou pas d'un prix mondial du carbone  et d'un marché régulé, organisé, autour de ce prix mondial. Yvon Martinet souligne que cette fixation d'un prix carbone est "la proposition des économistes français et européens, qui ont fait un appel à Paris le 4 juin 2015, pour cette mise en place d'un MRV fondé  sur un marché global et international du carbone."