Affaire des fadettes : pas de dysfonctionnement de la justice

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Rejetant la requête de l’Ordre des avocats, le tribunal judiciaire de Paris valide le bien-fondé du recours aux investigations téléphoniques de même que la procédure d'enquête préliminaire dans l'affaire dite "des fadettes".

En avril 2013, une information judiciaire a été mené par deux magistrats instructeurs du tribunal de Paris des chefs de corruption active et passive, trafic d’influence, faux et usage de faux, abus de biens sociaux, blanchiment, recel et complicité de ces infractions, commis par des personnes exerçant une fonction publique.
Dans le cadre de cette procédure, diverses commissions rogatoires ont été délivrées, visant notamment l’interception de communications téléphoniques depuis la ligne officielle d’un avocat.

Au regard de la teneur de ces interceptions, les deux magistrats ont communiqué au parquet national financier (PNF) deux rapports sur des faits non compris dans leur saisine.
Cette communication a donné lieu d'une part à une ouverture d’information des chefs de violation du secret de l’instruction, trafic d’influence passif par une personne exerçant une fonction publique, trafic d’influence actif par un particulier sur une personne chargée d’une mission de service public, complicité et recel de ces infractions et d'autre part à une enquête préliminaire du PNF sur des faits de violation du secret professionnel.

Les avocats en défense ont souhaité avoir connaissance du traitement et de la conduite de l’enquête préliminaire, dont les faits concernés ont finalement fait l'objet d'un classement sans suite.
Critiquant le traitement de l’enquête préliminaire par le PNF, l’ordre des avocats du barreau de Paris a fait assigner l’agent judiciaire de l’Etat devant le tribunal judiciaire de Paris en réparation d’un dysfonctionnement du service public de la justice.

Par un jugement rendu le 3 novembre 2021 (n° 20/12378), la première chambre civile du TJ de Paris rejette ces prétentions.

S'agissant du bien-fondé du recours aux investigations téléphoniques, le TJ indique qu'aucune écoute téléphonique n’a été diligentée dans le cadre de l’enquête préliminaire litigieuse et que le PNF a requis l’identification de numéros appelés et d’appelants d’un certain nombre de lignes téléphoniques par l’obtention de factures détaillées, le "bornage" des déplacements ou localisation des titulaires de ces lignes et l’identification des téléphones ayant activé certaines bornes.
Le tribunal estime que l’ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et de la correspondance ainsi commise, notamment des avocats concernés et de leurs interlocuteurs, n’apparaissait pas disproportionnée avec l’objectif poursuivi.
Il précise également que :
- les investigations ne portaient que sur une très courte période de temps ;
- seules les données les plus pertinentes ont été exploitées et retranscrites en procédure ;
- aucune écoute, ni mesure coercitive ou privative de liberté n’a été mise en œuvre ;
- le contenu de l’enquête préliminaire est par nature secret.

Enfin, concernant le choix procédural de l'enquête préliminaire et le déroulement de celle-ci, le tribunal estime qu’un traitement séparé des deux procédures ne pouvait être critiqué et conclut à l'absence de faute lourde au sens de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire.

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