Manquement au principe de la libre communication entre la personne mise en examen et son avocat

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Le défaut de délivrance d’un permis de communiquer à chacun des avocats désignés, avant un débat contradictoire tenu en vue de l'éventuelle prolongation de la détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen.

M. X. a été interpellé, puis mis en examen des chefs de trafic de cannabis. Il a choisi deux avocats qui l'ont assisté lors du débat contradictoire préalable à son placement en détention provisoire, le 15 mars 2017, puis un troisième avocat le 20 mars suivant.

Les trois conseils ont été convoqués pour un débat contradictoire en vue d'une éventuelle prolongation de la détention. Ayant demandé le report du débat, il leur a été répondu que les contraintes de service ne permettaient pas d'en décaler la date. Après avoir sollicité par courriel un permis de communiquer, l'avocat, désigné le 20 mars 2017, l'a demandé par télécopie reçue au service de l'instruction le 6 juillet 2017.

Le 10 juillet suivant, après un débat contradictoire auquel les trois conseils n'ont pas assisté, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la détention provisoire de la personne mise en examen, cette dernière a relevé appel de cette décision.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Reims a rejeté le moyen pris de l'irrégularité du débat contradictoire préalable à la décision de prolongation de la détention, tiré de l'absence de délivrance, avant ce débat, d'un permis de communiquer au troisième avocat désigné par la personne mise en examen.
Les juges du fond énoncent que, si la délivrance d'un permis de communiquer est indispensable à l'exercice des droits de la défense, il n'est toutefois pas caractérisé d'atteinte aux droits de la défense, dès lors que les dispositions de l'article 115 et de l'article 145 du code de procédure pénale, auquel renvoie l'article 145-1 du même code, ont été respectées.
Les juges ajoutent que, l'un des deux avocats en premier lieu désignés, dont la personne mise en examen a fait connaître qu'il devait recevoir les convocations, ayant bénéficié d'un permis de communiquer, il est sans effet sur la régularité du débat contradictoire qu'aucun permis de communiquer n'ait été adressé à la date du 10 juillet 2017 au troisième avocat désigné le 20 mars 2017, d'autant que ce conseil a indiqué au juge des libertés et de la détention qu'il ne serait pas en mesure d'assister son client, étant à cette date retenu en un autre lieu.

Le 20 juillet 2017, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'Homme, 115 et R. 57-6-5 du code de procédure pénale.
En vertu du principe de la libre communication entre la personne mise en examen et son avocat, résultant de l'article 6 paragraphe 3 c) de la Convention européenne des droits de l'Homme, la délivrance d'un permis de communiquer entre une personne détenue et son avocat est indispensable à l'exercice des droits de la défense. Il en découle que le défaut de délivrance de cette autorisation à chacun des avocats désignés, avant un débat contradictoire tenu en vue de l'éventuelle prolongation de la détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen.

En se déterminant ainsi, alors que, comme elle l'a elle-même rappelé, la délivrance d'un permis de communiquer est indispensable à l'exercice des droits de la défense, peu important que l'avocat concerné ne soit pas celui désigné par la personne mise en examen, conformément à l'article 115 du code de procédure pénale, pour recevoir les convocations et qu'il ait fait savoir qu'il ne pourrait se rendre au prochain débat contradictoire fixé en vue d'une éventuelle prolongation de la détention provisoire, la chambre de l'instruction, qui n'a pas relevé de circonstance insurmontable empêchant la délivrance de cette autorisation, a méconnu les stipulations conventionnelles et dispositions de droit interne susvisées et le principe précédemment rappelé.


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