CJUE : exonérations fiscales à des multinationales par la voie de rulings

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La CJUE apporte des précisions sur les conditions à réunir pour qualifier une mesure étatique de régime d’aides d'Etat.

Depuis 2005, la Belgique applique un système d’exonération des bénéfices excédentaires des entités belges intégrées à des groupes multinationaux de sociétés. Ces entités pouvaient bénéficier d’une décision anticipée (ruling) de la part des autorités fiscales belges, lorsque ces entités pouvaient faire valoir l’existence d’une situation nouvelle, telle qu’une réorganisation entraînant la relocalisation de l’entrepreneur central en Belgique, la création d’emplois ou des investissements. Dans ce cadre, étaient exonérés de l’impôt sur les sociétés les bénéfices considérés comme étant "excédentaires", en ce qu’ils dépassaient les bénéfices que des entités autonomes comparables auraient réalisés dans des circonstances similaires.

La Commission a constaté que ce système d’exonération des bénéfices excédentaires constituait un régime d’aides d’Etat illégal et incompatible avec le marché intérieur et a ordonné la récupération des aides octroyées.

Le Tribunal de l'Union européenne a annulé la décision de la Commission, constatant qu'elle avait erronément conclu que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires ne nécessitait pas de mesures d’application supplémentaires et que ce régime constituait, partant, un "régime d’aides", au sens du règlement 2015/1589 du 13 juillet 2015.
En outre, il a écarté les arguments de la Commission tirés de l’existence d’une prétendue "ligne systématique de conduite" des autorités fiscales belges.

Dans un arrêt du arrêt du 16 septembre 2021 (affaire C‑337/19), la Cour de justice de l'Union européenne rappelle que la qualification d’une mesure étatique en tant que régime d’aides présuppose la réunion de trois conditions cumulatives :
- des aides peuvent être octroyées individuellement à des entreprises sur le fondement d’une disposition ;
- aucune mesure d’application supplémentaire n’est requise pour l’octroi de ces aides ;
- les entreprises auxquelles les aides individuelles peuvent être octroyées doivent être définies "de manière générale et abstraite".

S’agissant de la première condition, la Cour clarifie la notion de "disposition".
Elle confirme que ce terme peut également renvoyer à une pratique administrative constante des autorités d’un Etat membre, lorsque cette pratique révèle une "ligne systématique de conduite".
La Cour précise qu'en ayant limité son analyse aux seuls actes normatifs, le Tribunal a procédé à une application erronée du terme "disposition".

Concernant la deuxième condition, à savoir l’absence de "mesures d’application supplémentaires", la Cour rappelle que cette question est intrinsèquement liée à celle de la détermination de la "disposition" sur laquelle ce régime se fonde.
Le Tribunal a omis de tenir compte du fait que l’une des caractéristiques essentielles du régime en cause résidait dans le fait que les autorités fiscales belges avaient systématiquement accordé l’exonération des bénéfices excédentaires lorsque les conditions étaient réunies.
Or, contrairement à ce que le Tribunal a jugé, l’identification d’une telle pratique systématique était susceptible de constituer un élément pertinent pour établir, le cas échéant, que les autorités fiscales ne disposaient en réalité d’aucun pouvoir d’appréciation.

S’agissant de la troisième condition, à savoir la définition "de manière générale et abstraite" des bénéficiaires de l’exonération des bénéfices excédentaires, la Cour relève que cette question est également intrinsèquement liée aux deux premières conditions, relatives à l’existence d’une "disposition" et à l’absence de "mesures d’application supplémentaires".
Partant, les erreurs de droit commises par le Tribunal concernant les deux premières conditions ont entaché son appréciation relative à la définition des bénéficiaires de l’exonération des bénéfices excédentaires.

La Cour conclut dès lors que le Tribunal a commis plusieurs erreurs de droit.
Par ailleurs, s’agissant de la preuve de l’existence d’une "ligne systématique de conduite", la Cour estime que l’échantillon des décisions examinées par la Commission (22 rulings sur le total des 66 sélectionnées de manière pondérée) est, par nature, susceptible d’être représentatif d’une "ligne systématique de conduite" des autorités fiscales belges.
La Cour annule donc l’arrêt du Tribunal.

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TUE : annulation de la décision de la Commission relative aux exonérations fiscales accordées par la Belgique par la voie de rulings - Legalnews, 18 février 2019

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