Transition numérique : le défi des professions du droit

Institutions
Outils
TAILLE DU TEXTE

congres-avocats-2015Retour sur la table ronde "Sécurité Juridique dans le monde numérique" qui s'est tenue lors du Congrès des avocats le 9 octobre 2015.

Roland Rodriguez, Vice-président du Conseil national des barreaux (CNB), Thomas Lesueur, Chef de service, adjoint au directeur des services judicaires au Ministère de la Justice, Alain Bensoussan, avocat au barreau de Paris, et Oussama Ammar, cofondateur de The Family, ont échangé sur les enjeux du numérique pour les avocats.

"Ce qui ne peut être évité, il faut l'embrasser"

La conversion numérique qui est en train de bouleverser nos modes de vie et de consommation, bouleverse également les professions du droit. Le savoir juridique est "à portée de clics", les clients des avocats peuvent consommer le droit sur internet et ceci a pour conséquence l'ouverture de nouveaux marchés que la profession d'avocat va devoir investir.

Auparavant il existait "une sorte d'asymétrie" entre l'avocat et son client de par l'information que possèdent l'un et l'autre. Grâce à internet cette asymétrie a tendance à disparaitre du fait de l'accessibilité des données.

Roland Rodriguez, Vice-président du Conseil National des Barreaux, souligne que pour autant la profession ne reste pas inerte face à cette révolution et a donc fait sien le précepte: "Ce qui ne peut-être évité, il faut l'embrasser". Depuis 1997 le CNB met en place des évolutions permettant à la profession de suivre ces transitions. Par exemple, la mise en place du Réseau Privé Virtuel des Avocats(RPVA), en lien avec le Réseau Privé Virtuel Justice (RPVJ), crée par le Ministère de la justice.

Depuis sa création le RPVA n'a cessé de se développer, permettant l'identification et la signature numérique, ainsi que la dématérialisation de l'acte d'avocat. Ce qui est donc "d'ores et déjà une réalité" tient à souligner le Vice-président du CNB à l'attention du Ministre Emmanuel Macron pour qui ces faits apparaissaient comme des pistes de réflexion au développement de la profession.
Roland Rodriguez insiste sur la nécessité de "se doter d'outils pour faire face à la mutation numérique".

Ne pas se placer face, mais aux côtés de la mutation numérique

Oussama Ammar co-fondateur de l'incubateur d'entreprises The Family, souligne que "la question du numérique dans la profession n'est pas isolationniste". Egalement, il salue la mise en place d'infrastructures permettant à la profession de suivre cette mutation numérique.

Cependant, celui-ci pose un "mais", car si l'on peut féliciter la profession de ne pas vouloir se laisser dépasser, il précise tout de même que le problème est "ce que les avocats sous-estiment dans ce monde numérique, c'est que le mouvement n'a fait que commencer et qu'il est exponentiel". Les infrastructures mises en place ne seront donc pas suffisantes.

Oussama Ammar reprend en demandant pourquoi le numérique est perçu comme une menace, pourquoi ne serait-il pas finalement porteur d'une plus grande sécurité? Ainsi, la question à poser serait donc plutôt "quel rôle dans la sécurité juridique de l'avocat le numérique peut-il jouer ?"
Il ne s'agit pas non plus de se demander si les avocats vont disparaitre mais comment ils vont évoluer, "à quoi va ressembler l'avocat de demain" et de savoir s'il est assez armé aujourd'hui pour devenir cet avocat de demain ?

Il tente alors pour conclure de soulever l'enjeu majeur de cette transition numérique en soulignant que la plus grosse évolution au sein de la profession ne peut pas se faire par le biais d'outils, mais par la remise en question des avocats eux-mêmes: "Plus la professions mettra de distances avec ces transformations, plus elle aura des barrières et des protections, et moins elle verra venir ces transformations qui n'est pas une vague mais véritablement un tsunami."

Enfin, Alain Bensoussan, avocat au Barreau de Paris, s'accorde avec Oussama Ammar en mettant en avant l'urgence face à laquelle la profession doit s'investir de cette révolution car "derrière la transition numérique, à toute vitesse arrive aune autre transition et si nous manquons la première, nous ne pourrons saisir la seconde."
Pour lui, l'avenir des avocats se trouve dans la maîtrise de "la transition intelligente", c'est-à-dire dans l'assistance robotisée du Cloud, des avatars et de la commande vocale.

Andrea Batignani

congres-avocats-2015-numerique