Dieselgate : la saga continue

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En 2015, il est apparu que Volskwagen aurait utilisé des logiciels permettant de détecter les périodes pendant lesquelles des tests moteurs étaient effectués afin de modifier le comportement du moteur et obtenir temporairement des résultats concernant le taux d’oxyde d’azote (NoX) correspondant à ceux prévus par les textes.

Une procédure multi-pays à l’encontre de nombreux constructeurs

Cette situation aurait perduré de 2009 à 2015 et a  conduit à des procédures dans différents pays (États-Unis, Allemagne, France…). Apparemment, ce constructeur n’était pas le seul à s’inquiéter des résultats des tests anti-pollution de ses moteurs puisque des enquêtes ont été ouvertes contre certains de ses concurrents dans divers pays et ont ainsi conduit en France à la mise en examen de Renault, Peugeot et Citroën avant peut-être la future mise en examen d’autres constructeurs.

Des milliards de dollars en jeux

Les dossiers du Dieselgate ont déjà donné lieu à des transactions dans différents pays notamment entre Volskwagen et les entités concernées pour des sommes se chiffrant en milliard de dollars. Les procédures en cours peuvent conduire à des sanctions pénales mais avoir aussi d’importantes conséquences financières pour les constructeurs qui pourraient devoir indemniser les acquéreurs de voitures.

Sur le plan judiciaire, l’interprétation de certains des textes applicables a été donnée par l’arrêt de la Cour de Justice du 17 décembre 2020 dans l’affaire C-693/18 à la suite de questions préjudicielles posés par un juge d’instruction du TGI de Paris dans le cadre d’une procédure ouverte en France contre divers constructeurs.

Une chance éventuelle pour les mis en examen ?

vient du fait que plusieurs juridictions allemandes avaient posé des questions préjudicielles qui auraient clarifié d’autres textes applicables à l’époque des faits sans que cela soit forcément à l’avantage des constructeurs, mais ces questions ont été retirées par les juridictions allemandes et les affaires radiées par la Cour de Justice. Les ordonnances de radiation ne donnent pas d’information sur le sous-jacent de la radiation, mais on peut supposer qu’une transaction passée par le constructeur concerné en est à l’origine.

Le débat reste donc ouvert et les mis en examen sont évidemment présumés innocents.

La pression sur les constructeurs afin de moins polluer ne va pas se réduire

En effet, les textes concernant les méthodes de contrôle des taux de pollution avaient été modifiés à la suite de ces premiers scandales, mais la Commission avaient pris un règlement d’exécution qui aboutissait à limiter les efforts devant être fournis par les constructeurs.

Ce règlement avait été attaqué par les villes de Paris, Bruxelles et Madrid et annulé par le Tribunal le 13 décembre 2018 (Aff T-339/16, T-352/16 et T-391/16). Un pourvoi a été formé et l’Avocat Général a rendu ses conclusions le10 juin 2021 (Aff C-177 à 179 P) et propose de rejeter les pourvois ce qui conduirait de fait à durcir les obligations imposées aux constructeurs.

En tout état de cause, la concomitance des affaires où divers constructeurs européens se sont vus poursuivre pour leur méthodes utilisées pour respecter ou faire semblant de respecter les critères anti-pollution conduit à se poser plusieurs questions ?

Pourquoi plusieurs constructeurs ont agi de manière similaire ?

On peut en effet se demander pourquoi plusieurs constructeurs ont agi de manière similaire à peu près à la même époque. Ont-ils tous cru indépendamment les uns des autres que leur analyse des textes étaient correctes ou y a-t-il eu des contacts entre eux qui relèveraient éventuellement des règles de concurrence ?

S’agit-il d’un simple parallélisme de comportement à la suite de décisions totalement indépendantes. Si cela est le cas, comment se fait-il que les plus importants constructeurs européens aient eu des problèmes à respecter les règles ? Si l’on distingue Volskwagen qui a transigé et ceux qui indiquent ne pas avoir enfreint les règles applicables, comment leur management a-t-il pu se retrouver alors dans une situation de ce type compte tenu de l’importance évidente  notamment pour leur image de marque –indépendamment des risques juridiques et économiques - qu’avait déjà les règles environnementales au moment où les faits se sont déroulés.

Le dossier pénal donnera certainement des réponses, mais pas forcément à toutes les questions

Les constructeurs ont-ils sinon su ou sauront-ils en tirer des leçons pour leur comportement futur ? En tout état de cause, le risque pénal et financier est toujours pendant et l’addition risque d’être lourde.

Richard Milchior, Avocat Associé Herald