La Cour de cassation requalifie le lien unissant Uber à un chauffeur en "contrat de travail"

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La Cour de Cassation rejette le pourvoi formé par Uber et par voie de conséquence, confirme l’arrêt du 10 janvier 2019 de la Cour d’Appel de Paris. Elle confirme ainsi que le lien qui unit la plateforme Uber aux chauffeurs est bien un contrat de travail.

Le 4 mars 2020, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par Uber et par voie de conséquence confirmé la décision de la Cour d’appel de Paris qui avait rendu un arrêt le 10 janvier 2019, jugeant que « le contrat de partenariat signé par M. Maximilien Petrovic (chauffeur) avec la société Uber BV s'analyse en un contrat de travail. »

En conséquence, chaque chauffeur VTC qui travaille pour une ou plusieurs plateformes VTC pourra désormais se prévaloir de cette décision de principe pour s’il le souhaite solliciter du juge la requalification de sa propre relation de travail en contrat de travail.

La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par Uber et ainsi confirmé la décision de la cour d’appel en considérant que :

« La cour d'appel, qui a ainsi déduit de l'ensemble des éléments précédemment exposés que le statut de travailleur indépendant de M. Petrovic était fictif et que la société Uber BV lui avait adressé des directives, en avait contrôlé l'exécution et avait exercé un pouvoir de sanction, a, sans dénaturation des termes du contrat et sans encourir les griefs du moyen, inopérant en ses septième, neuvième et douzième branches, légalement justifié sa décision.»

Cette décision de principe confirme l’application à Uber, et plus largement aux plateformes, des critères traditionnels du contrat de travail (direction, contrôle, sanction), Uber s’étant comporté comme le véritable employeur des chauffeurs, lesquels ne sont pas en réalité des travailleurs indépendants.

Désormais, chaque chauffeur VTC qui travaille pour une ou plusieurs plateformes VTC pourra se prévaloir de cette décision de principe pour s’il le souhaite, solliciter du juge la requalification de sa propre relation de travail en contrat de travail et bénéficier des droits qui s’attachent à tous salariés (respect de la durée légale du travail, heures supplémentaires, salaire minimum, congés payés, formation professionnelle, retraite, droit à une représentation du personnel, droit au chômage en cas de rupture du contrat de travail, etc….)

Au-delà de la situation des chauffeurs VTC, cette décision aura également d’autres répercussions :

  • En effet, toutes les plateformes de travail qui s’inspirent peu ou prou du modèle « Uber » sont concernées par cette décision de principe.

  • Les entreprises qui s’estiment concurrencées par les plateformes VTC pourront également se servir de cette décision pour démontrer une éventuelle concurrence déloyale.

  • Cette décision peut enfin justifier des contrôles URSSAF aboutissant à des redressements de cotisations sociales représentant des centaines de milliers d’euros.

Selon Maître Fabien Masson, plus globalement, « le modèle social du travail dans l’économie collaborative qui concerne principalement les jeunes générations devra trouver sa place dans la législation française. Il est nécessaire que le législateur se saisisse de la question et offre un cadre juridique répondant à la fois au modèle social français, à la nécessité de protéger des travailleurs qui sont souvent les plus démunis, mais également aux nouvelles aspirations de l’économie collaborative. »