Décision de la Cour d’Appel de Versailles sur le crash du Concorde

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Un avion Concorde s'est écrasé juste après son décollage le 25 juillet 2000. Ce crash avait fait 113 morts : 100 passagers, l'équipage de 9 personnes et 4 victimes au sol, lors de son écrasement sur un hôtel de Gonesse, dans le Val-d’Oise. Le 29 novembre 2012, la Cour d’Appel de Versailles rend sa décision.

 

Contexte :

Le procès devait déterminer s'il y a des responsables dans cette catastrophe. L’enquête a montré  que l’explosion d'un panneau de réservoir de 32x30 cm était liée à l’éclatement d’un pneu, lui-même dû à la présence sur la piste d’une lamelle en titane perdue par un DC-10 de Continental  Airlines. Le BEA (Bureau Enquêtes et d'Analyses pour la Sécurité de l'Aviation civile) a considéré cet accident comme imprévisible compte tenu qu'un tel phénomène n'avait jamais eu lieu dans l'histoire de l'aéronautique. 

Après huit ans d’instruction, le procès de l’accident s’est tenu pendant 4 mois à partir de février 2010 devant le tribunal correctionnel de Pontoise. Une décision a été rendue le 6 décembre 2010. À l'issue de ce premier procès, Continental Airlines avait été désigné comme seul responsable de la catastrophe, Claude Frantzen de la DGAC ayant été relaxé.

La compagnie américaine avait été condamnée à une amende de 200 000 euros et à verser un million d'euros de dommages et intérêts à Air France. Un de ses employés avait écopé de quinze mois de prison avec sursis pour avoir mal fixé la lamelle. Un appel a été formé, tant par les deux compagnies aériennes que par le parquet. Le second procès s’est déroulé de mars à juin 2012 devant la Cour d’Appel de Versailles. Six prévenus, dont quatre avaient été relaxés en première instance, devaient être rejugés. La Cour a décidé la relaxe de Continental Airlines, de ses salariés et d’un haut fonctionnaire de la DGAC.

Les parties en présence : étaient jugés pour homicides et blessures involontaires :

  • Claude Frantzen, ancien directeur du SFACT à la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) représenté par le cabinet Soulez Larivière & Associés, avec Daniel Soulez Larivière, associé, et Astrid Mignon-Colombet, associée. 

La DGAC française et la CAA britannique ont co-délivré les certificats de navigabilité du Concorde, et assuré ensemble son suivi de navigabilité.
Claude Frantzen a été relaxé par la Cour d’Appel. Rappelons qu’en première instance, Soulez Larivière & Associés avait déjà obtenu la relaxe de Claude Frantzen. 
Nota bene juridique : Claude Frantzen a été relaxé en l'absence d'un "lien de causalité certain et continu" avec l'accident. 

La preuve d’une causalité certaine de la faute avec l’accident n’a pas été rapportée du fait de deux raisons concrètes : 

- Si Claude Frantzen avait proposé la suspension des vols des avions Concorde, il n’est pas du tout sûr que son avis aurait été suivi et les vols stoppés.
- Si Claude Frantzen avait demandé le changement des pneus et le renforcement de la voilure avant 1994 (date de son départ de la DGAC), il n’est pas du tout certain que l'accident de 2000 aurait été évité.

  • La compagnie américaine Continental Airlines, exploitant du DC-10 ayant perdu la lamelle de titane, dont l'avocat est Olivier Metzner, du cabinet Metzner Associés.

Elle a été reconnue responsable en première instance. Elle est relaxée en appel, mais reste néanmoins reconnue civilement responsable. À cet égard, elle est condamnée à verser 1 million d’euros de dommages et intérêts à Air France au titre de "l’atteinte à son image"et plus de 300 000 euros à diverses parties.  

Deux employés de la compagnie étaient également poursuivis et sont relaxés : 
- Stanley Ford, chef de l'équipe d'entretien chargée du DC-10, représenté par Emmanuel Marsigny du cabinet Metzner Associés.
- Son subordonné John Taylor, chaudronnier, qui a posé la pièce défectueuse sur le DC-10, représenté par François Esclatine du cabinet Veil Jourde. Il avait été condamné à 15 mois de prison avec sursis en première instance.
Nota bene juridique : La Cour d’appel l’a relaxé au motif qu’il ne pouvait avoir conscience que les éventuelles fautes commises dans la pose de la lamelle pouvaient avoir pour conséquence l’enchaînement catastrophique ayant abouti au crash du Concorde.

La Cour a par ailleurs validé l’utilisation du titane pour la fabrication de la pièce en question.

  • Quant aux deux ex-responsables du programme Concorde, leur cas a été disjoint à cause de l’état de santé d’Henri Perrier.

Henri Perrier est décédé pendant ce deuxième procès, et Jacques Herubel, relaxé en première instance, sera lui rejugé en janvier 2013.

Ces responsables et le constructeur, l'Aérospatiale, devenue EADS, sont représentés par Thierry Dalmasso du cabinet Morgan Lewis, Vonnick Le Guillou du cabinet Bird & Bird et Christian Buffat du cabinet HMN & Partners.

Parmi les 19 parties civiles: 

  • La compagnie Air France, l'exploitant de l'appareil, est représentée par Fernand Garnault du cabinet Garnault Rembauville Bureau Tassy. 
  • le Syndicat National des Pilotes de Lignes qui est représenté par Roland Rappaport, avocat au barreau de Paris. 

Ce procès d’accident aérien entre dans la catégorie des procès hors normes, avec pas moins de 90 tomes de dossiers, près de 550 pièces à conviction présentées, des audiences s’étalant sur plusieurs mois, une forte technicité et une très large médiatisation, puisque plus de 200 journalistes et techniciens ont assisté aux débats.