Une nouvelle étape est franchie dans l'affaire Phoenix

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Dans un récent arrêt, la Cour fédérale de justice allemande a jugé que qu’il n’y avait pas de droit de distraction pour les investisseurs Phoenix, donnant ainsi droit à une action introduite par Me Frank Schmitt, du cabinet d’avocats Schultze and Braun, administrateur de l’insolvabilité dans la procédure Phoenix.

Dans son récent arrêt, (réf.: IX ZR 49/10), la Cour fédérale de justice allemande (BGH) a donné droit à une action introduite par Me Frank Schmitt, du cabinet d’avocats Schultze and Braun, administrateur de l’insolvabilité dans la procédure Phoenix. L’objet de l’audience était de clarifier si certains créanciers de Phoenix pouvaient faire valoir un droit de distraction, ce qui revient à dire qu’une partie des fonds mis sous séquestre par l’administrateur de l’insolvabilité devrait être versée à des créanciers sans que ces derniers soient soumis à la discipline collective  de la procédure d'insolvabilité.

Dans son arrêt du 10 février, la Cour fédérale de Justice a nié l’existence d’un tel droit de distraction. Il est ainsi établi que les fonds en question, qui s'élèvent à près de 170 millions d'euros, doivent être considérés comme faisant partie de la masse de l’insolvabilité et seront donc répartis entre la totalité des 30.000 créanciers, dont plus de 2.000 en France,  conformément au code de l'insolvabilité.

La position de la Cour fédérale de justice sur cette question transparaissait déjà pendant l’audience. Dans le cadre de l’exposé des faits, le président de chambre avait constaté que « les comptes étaient un instrument du système dit de  boule de neige » et que « dans le cas présent, le patrimoine du fiduciaire avait été mélangé au patrimoine propre. »

Après la proclamation de l'arrêt, l’administrateur de l'insolvabilité, Me Frank Schmitt a exprimé son soulagement : « Avec cette décision, on a supprimé un grand obstacle. Je suis heureux que la sécurité juridique règne enfin sur ce point et que le calme soit revenu dans la procédure. Mais, en raison de la complexité de ce cas, des années seront encore nécessaires pour réaliser les éléments du patrimoine restants et clore la procédure d’insolvabilité ». Selon Me Schmitt, la Cour fédérale de justice a fondé sa décision sur le fait qu'en raison des nombreux mouvements de comptes, il n’était plus possible d’affecter sûrement, a posteriori, les avoirs mis sous séquestre à des investisseurs précis.

L’administrateur de l’insolvabilité va maintenant vérifier, en concertation avec le tribunal de l’insolvabilité et le comité des créanciers, les possibilités de distribuer  une partie de la masse de l’insolvabilité aux créanciers avant la fin de la procédure. Étant donné qu’il faudra encore s’harmoniser avec une multitude de créanciers impliqués et la « Entschädigungseinrichtung der Wertpapierhandelsunternehmen (EdW) », l’institution allemande visant à protéger de petits et grands investisseurs, on ne doit pas s’attendre à une distribution dans le courant de l’année en cours.

Pour mémoire :

Phoenix est l’un des plus gros scandales financiers « à la Madoff » que l’Allemagne ait connu.

Cette société avait la gestion du fonds d’investissement « Phoenix Managed Account » dont les excellents rendements affichés étaient fictifs et obtenus à l’appui de documents comptables falsifiés ; l’argent des souscripteurs n’était en réalité, pour la majeure partie, pas investi en bourse mais notamment utilisé pour verser des prétendus bénéfices aux investisseurs. Au total, environ 30.000 investisseurs sont concernés pour un montant d’environ 600 millions d’euros. Ainsi en France, plus de 2 000 personnes en ont été victimes pour un montant d’au moins 50 millions d’euros.

Après avoir obtenu en décembre 2009, une jurisprudence de la Cour d’appel de Colmar susceptible d’aboutir à la concentration des quelques 140 actions révocatoires devant le TGI de Strasbourg, le cabinet Schultze & Braun a abouti en mai 2010 aux premières décisions contradictoires de première instance sur le fond condamnant différents investisseurs français au remboursement des bénéfices fictifs touchés.