Isabelle Rein-Lescastéreyres : "Nous avons voulu un ouvrage pratique et adapté aux situations de plus en plus complexes des familles, qui réconcilie les professionnels avec le droit international privé"

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Isabelle Rein-Lescastéreyres, Associée, BWG AssociésQuestions à Isabelle Rein-Lescastéreyres, avocate associée au sein de BWG Associés à propos de l'ouvrage sur le Droit international privé édité chez LGDJ. 

Quel a été le point de départ de cet ouvrage ?

Le droit international privé est une matière aride qui peut faire peur, même aux avocats ! Pourtant, l’internationalisation des familles rend la matière incontournable, car de plus en plus de dossiers comportent un élément d’extranéité : une union internationale, une double nationalité, une succession à l’étranger… Les avocats en droit de la famille sont donc amenés à savoir traiter ces dossiers et ont intérêt à développer ce champ de compétences. Personnellement, je pense que c’est la pratique qui permet de développer de bons réflexes. Je suis moi-même venue au droit international privé par l’étude des dossiers, après une formation HEC. J’anime depuis plusieurs années aux Etats Généraux du Droit de la Famille un atelier Droit International de la famille conçu autour de la résolution de cas pratiques. C’est en raison de son succès que nous avons commencé à discuter avec Marie-Laure Niboyet (auteur et intervenante à l’atelier) d’un manuel de cas pratiques, qui pourrait compléter son ouvrage de droit international privé. Son éditeur, LGDJ, avait lui aussi l’envie de créer une série de cas pratiques. Nous avons ensuite co-écrit l’ouvrage avec Marie-Laure Niboyet et Laurie Dimitrov, avocate au sein de BWG Associés.

A qui est-il destiné ?

Le livre intéresse en priorité les avocats en droit de la famille, les notaires et les étudiants de Master préparant le CAPA ou l’Ecole Nationale de la Magistrature. Nous avons souhaité traiter l’ensemble des problématiques qui se posent aujourd’hui dans un contexte international : divorce, mais aussi mariage, succession, filiation, enlèvement d’enfant… Pour cette 2ème édition, nous avons d’ailleurs apporté des évolutions afin de traiter de la jurisprudence la plus récente, notamment sur la gestation pour autrui ou l’adoption de l’enfant du conjoint dans les couples de même sexe. Nous avons voulu un ouvrage pratique et adapté aux situations de plus en plus complexes des familles, qui réconcilie les professionnels avec le droit international privé. Le choix d’un format de consultations n’est pas non plus un hasard : aujourd’hui, l’un des rôles de l’avocat est d’anticiper les évolutions pour ses clients, qu’elles soient matrimoniales comme successorales. Plutôt que de se limiter à une activité contentieuse, nous pensons que l’avocat doit s’ouvrir au conseil, et qu’il doit le faire en collaboration avec d’autres professionnels, comme les notaires ou encore les gestionnaires de patrimoine.

En l’absence d’une évolution du droit de la filiation pour l’instant, quelle est la situation sur les questions de GPA et de PMA ?

Le 26 juin 2014, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a condamné la France pour avoir refusé de transcrire à l’état civil français les actes de naissance d’enfants nés à l'étranger dans le cadre d'une GPA, à tout le moins vis-à-vis du père biologique. La commission des lois du Sénat a récemment publié un rapport qui préconise de continuer à refuser la transcription vis-à-vis du parent d’intention mais aussi tout établissement ultérieur du lien de filiation vis-à-vis de ce dernier (par une adoption ou par le jeu de la possession d’état). La PMA n’est toujours pas ouverte aux couples de même sexe en France. Elle reste pour l’instant conçue uniquement comme une réponse médicale à l’infertilité. Mais le droit de la filiation devra sans doute tôt ou tard évoluer pour s’adapter aux enjeux et aux modes de vie de notre époque comme aux progrès de la science médicale.

Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)